La stratégie de l’entreprise est simple : « une fois que le marché français était correctement quadrillé, l’objectif était d’aller hors de nos frontières. Nous avons commencé par les pays proches en Europe, avec le Benelux, l’Italie, l’Espagne et l’Allemagne pour apprendre la manière de travailler à l’export », explique au Moci Jean-François Birac, P-dg de Blanc des Vosges.
A la suite des bons résultats réalisés en Europe, il y a 10 ans, l’Asie devient ensuite la cible prioritaire de l’entreprise. La Corée du Sud, Taiwan et le Vietnam sont les premiers pays visés.
« Il existe une véritable sensibilité aux produits Made in France avec un design français. Le ‘chic à la française’ est toujours bien vu des consommateurs asiatiques. C’était déjà important dans nos magasins en France, mais c’est d’autant plus important dès lors qu’on arrive directement dans leurs pays », souligne le P-dg.
Blanc des Vosges poursuit son expansion avec le marché chinois, il y a 5 ans, mais il y connaît de nombreuses difficultés. « Généralement, c’est plutôt le contraire. Ce sont les Chinois qui viennent vendre du linge de maison en Europe plutôt que l’inverse ! », s’amuse aujourd’hui Jean-François Birac. « Nous y sommes arrivés par Hong-Kong car c’est une plateforme pour l’Asie », ajoute ce dernier.
Hong-Kong, véritable porte d’entrée sur le marché chinois
La PME ouvre en 2016 un premier stand de 40 m2 dans le grand magasin SOGO à Causeway bay, situé dans la rue la plus populaire de la ville. Et c’est le début d’une belle aventure. Un an et demi plus tard, l’entreprise déploie une 2e boutique de 120 m2 au cœur du centre Mira Place à Tsim Sha Tsu.
Et en juin 2022, Blanc des Vosges inaugure une 5e boutique hongkongaise de 80 m2, située au cœur de Park Central, avec 6 mois de retard en raison du contexte sanitaire.
L’aventure chinoise, une success story mûrement réfléchie
Pour la petite histoire, Blanc des Vosges ne s’est pas lancée dans l’aventure chinoise du « jour au lendemain ». Une longue période de consultation des marchés entrepris avec les réseaux de Bpifrance ont été nécessaires afin de savoir quel était le meilleur moyen d’entrer sur ce vaste territoire.
Trois solutions possibles se dégagent de cette période d’étude de l’approche marché : les contrats de distributeurs, une distribution via des importateurs ou en propre. La troisième solution est alors préférée par l’entreprise. « Nous avons donc créé une filiale, Blanc des Vosges Asia, basée à Hong Kong qui gère l’ensemble des magasins, l’approche opérationnelle et les ventes », se félicite Jean-François Birac. La filiale emploie une quinzaine de personnes au total.
Au départ, la situation est compliquée pour des raisons de notoriété. « Personne ne savait qui on était, explique le dirigeant. Il faut redémarrer à zéro, en réfléchissant sur le produit, l’adapter aux normes et cultures de la région ».
Des investissements importants
La PME investit alors massivement dans le marketing. L’équipe de design française a pour instruction aujourd’hui de créer des collections spécifiques pour le marché chinois. « En termes de qualité, nous sommes positionnés sur du luxe premium, beaucoup plus qu’en France ». La raison ? Se différencier des marques nationales de l’industrie du linge de maison en Chine qui sont très nombreuses.
« La perception du Made in France quel que soit le produit a une image très haut de gamme. Nous avons travaillé sur des satins 300 fils, des touchers exceptionnels, des dessins jacquards, des finitions beaucoup plus sophistiquées avec un nombre de points plus importants (3 points de couture au cm en France, contre 4 points en Chine) », détaille le P-dg.
Autres particularités : l’ensemble des fermetures se fait en boutons ou en zip, de préférence à la cheminée utilisée en Europe. Des couleurs comme le violet sont proscrites en Chine. Le rouge est un incontournable, notamment pour un mariage ou en période de fête. « Ce sont des choses que l’on a appris sur le tas. Nous n’avions pas lancé des collections spécifiques au départ. Or, maintenant, nous faisons des collections capsules, à la demande de nos magasins », précise Jean-François Birac.
Côté prix, une parure chinoise est 1,8 fois plus chère qu’en Europe. L’entreprise n’a pas lésiné sur les investissements. En moyenne, le loyer est 50 % à 70 % plus élevé qu’à Paris. « Celui de Sogo est même 100 % plus cher que le flagship de Paris », affirme ce dernier.
Mais, fait plus curieux selon le P-dg, un produit qui n’a pas un prix élevé à Hong Kong ne se vend pas car il est considéré comme suspect. « Nos responsables de boutique veulent vendre encore plus cher, avec des produits encore plus premium ».
Aujourd’hui, l’export représente 22 % du CA du groupe, dont 50 % de part de marché pour l’Asie. La Chine représente, à elle seule, 35 % et continue sa forte progression. « Plus on ouvre de magasins, plus le CA grimpe », confirme le P-dg.
La Chine continentale, l’étape d’après
La Chine continentale constitue l’étape d’après pour Blanc des Vosges. « Pour ce marché, il est toutefois nécessaire de faire appel à un partenaire chinois. Ce n’est pas possible d’y aller en fonds propres », se désole-t-il.
Actuellement les négociations sont en cours. Une joint-venture avec un partenaire chinois, créée il y a deux ans, n’a pas connu le succès. « Il faut une vraie confiance. Il est très difficile de travailler et de trouver le bon partenaire », affirme Jean-François Birac.
Le contexte de pandémie de ces deux dernières années a, par ailleurs, été un frein pour la PME vosgienne, avec deux projets qui ont été mis en pause, par décision mutuelle française et chinoise. L’entreprise souhaite pourtant continuer sur sa lancée. « Il reste des opportunités immobilières car de nombreuses marques, locales et internationales, ont fermé en raison du contexte actuel », poursuit-il.
Et la marque vosgienne ne compte pas en rester là. Les États-Unis sont également considérés comme un marché porteur mais dans un futur projet à deux, voire trois ans.
Côté matières premières, Blanc des Vosges n’a pas connu de gros problèmes d’approvisionnement, le fil de coton utilisé provenant principalement des États-Unis. « Mais les prix ont bondi de 40 % pour le coton brut et de 30 % pour le papier », conclut-il. Aujourd’hui, la PME dispose de 6 mois de stock, contre 3 mois auparavant.
Claire Pham pour le MOCI